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Division du travail selon le genre dans un contexte de changement climatique en Moyenne Casamance (Sud du Sénégal)

Résumé

Les attitudes à l’égard de la gente féminine au Sénégal d’une manière générale et en particulier en Casamance, au sein du ménage, réduisent leurs opportunités à participer dans la vie active et surtout à profiter des activités à forte manne financière. Pour la majeure partie, elle occupe les activités de second rang comme l’agriculture maraîchère, la riziculture, quelque temps du petit commerce.

Cet article met en évidence la question de la gestion du travail en milieu rural dans la moyenne Casamance. La méthodologie repose sur les enquêtes socio-économiques auprès de 15% des ménages ruraux des villages de Badobar, Bambali Brassou, Tanaf, dont 100 ménages selon une approche de boule de neige. Les entretiens semi-directs ont été effectués auprès des groupements de femmes (4), des leaders coutumiers (4) et des autorités territoriales (2).

Les résultats obtenus montrent qu’hormis les tâches ménagères, les femmes se mobilisent le plus dans l’agriculture maraîchère et vivrière dont les pesanteurs sociales limitent leurs accès facile à la terre.

Introduction

Les disparités sociales basées sur le sexe sont de plus en plus notées en Afrique. Les fonctions, activités ou rôles sont généralement répartis selon le sexe de l’individu. Cette situation peut être un obstacle au développement dans les sociétés actuelles où les populations féminines deviennent de plus en plus nombreuses. Les activités socio-économiques des pays africains sont plus orientées vers le secteur primaire. Souvent compris comme un atout au développement, les activités de recherche sont plus orientées vers la gente féminine. Depuis, les événements climatiques ayant emmené l’appui des organismes internationaux aux pays du Sahel à travers l’aide des plans d’ajustements structurels, l’agriculture sahélienne a connu une situation difficile.

A l’heure actuelle, de la parité « absolue et intégrale dans les instances électives ou semi électives », le statut social et culturel du genre reste la priorité en premier ordre pour le Sénégal, dont la prise en mesure passe nécessairement par défier les politiques (ANSD, 2016). L’intégration sociale, politique et économique de la population féminine demeure toujours problématique.

Aujourd’hui, de nouvelles organisations plaident pour une meilleure condition de la femme sénégalaise dans le travail. En Casamance, l’environnement biophysique a contribué à l’exacerbation de la dimension genre dans le travail. Depuis ces quinze dernières années, la Moyenne Casamance ou la région de Sédhiou traverse de multiples crises : agricole, socio-économique et politique. Les péjorations climatiques ont entrainé des déficits pluviométriques, une baisse de la production agricole et une diminution des surfaces cultivées. L’insécurité politique constitue un des facteurs bloquant au développement d’une grande partie de cette zone. Plusieurs ONG sont intervenues à travers des programmes et projets dans la moyenne Casamance. Mais l’insécurité et la variabilité hydroclimatique qui prévalent depuis ces trois dernières décennies ont contribué à la mutation des agrosystèmes. Ces mutations conduisent les paysans à développer des stratégies de résilience allant de la diversification des cultures à l’exode rural afin de minimiser les risques. Face à ces contraintes, les stratégies de résilience varient selon qu’on est homme ou femme, qu’on est riche ou pauvre, qu’on est jeune ou vieux. Cette étude vise à analyser la répartition sexuelle des tâches et les enjeux socio-économiques dans un contexte de mutations socio-spatiales.

Cette situation contribue à l’insécurité alimentaire surtout dans les zones rurales. À l’échelle nationale, la prise de conscience de cet état de fait se manifeste aujourd’hui par des efforts d’adaptation de la riziculture dans des zones traditionnellement réservées à d’autres cultures ; c’est le cas du bassin arachidier et du Sénégal oriental. Dans la région de Sédhiou en Moyenne Casamance, l’agriculture est pratiquée, selon, la tradition, les groupes ethniques, par les femmes et les hommes de façon complémentaire ou séparer. Le genre est un facteur déterminant en milieu manding (ethnie majoritaire en moyenne Casamance), car il oriente le type d’activité et le niveau de responsabilité. Les hommes sont en charge généralement des destinées de la famille. Ils sont sur le plateau pour pratiquer l’agriculture de subsistance. Quant aux femmes, elles pratiquent essentiellement la riziculture au niveau des bas-fonds et le maraîchage aux alentours des ménages.

La production agricole repose sur la main d’œuvre familiale qui est de moins en moins importante du fait de la scolarisation des jeunes et de l’émigration temporaire ou définitive. Elle est organisée autour des champs collectifs (céréales ou arachides) pour assurer la sécurité alimentaire de l’exploitation familiale et des champs individuels (cultures de rente principalement) pour disposer de revenus monétaires et faire face à certains investissements ou besoins personnels.

Toutefois, elle demeure le socle de la cohésion sociale et permet aux différents membres de la famille de disposer de revenus surtout avec la commercialisation des cultures de rentes et de certaines céréales à forte valeur ajoutée (mil, maïs) pour ainsi les orienter vers de nouvelles activités plus bénéfiques. En moyenne Casamance, la femme joue un rôle prépondérante tout au long de la chaîne alimentaire. Les femmes s’occupent générales de la semence, de la récolte, de la conservation et de la préparation ou la commercialisation de ces produits. Dans un contexte de péjoration climatique qui favorise la salinisation des terres au niveau des bas-fonds (zone de culture réservée aux femmes), cette étude s’interroge sur les facteurs de la division du travail dans la moyenne Casamance.

Dans le souci de mieux comprendre l’organisation du travail selon le genre dans la moyenne Casamance, il sera question d’identifier les facteurs engendrant la division du travail et de dégager les réponses apportées pour une meilleure efficacité des actions.

Méthodologie

La région de Sédhiou s’étend sur une superficie de 7 330 km², soit 3,7 % du territoire national. Elle est limitée, au Nord, par la République de Gambie, au Sud, par les Républiques de Guinée Bissau et de Guinée Conakry, à l’Est, par la région de Kolda, à l’Ouest, par la région de Ziguinchor. Cette position, qui en fait une région frontalière à trois pays et située au centre de la Casamance, lui confère un potentiel géostratégique énorme dans les dynamiques économiques, sociales et culturelles de la sous-région. La région est arrosée par le fleuve Casamance, qui sépare le département de Goudomp de celui de Sédhiou, et le Soungrougrou qui sépare le département de Bounkiling de celui de Sédhiou. Sur la base des projections démographiques, la population de la région de Sédhiou s’établit à 553 005 habitants en 2019, soit 3,4% de la population sénégalaise. En 2025, cette population atteindra 679 840 habitants soit un accroissement de 126 835 en six ans.

La structure par sexe et par âge met en exergue le caractère jeune (âge moyen est de 21 ans) de sa population. En outre, les hommes prédominent (50,7%). Une bonne partie de cette population vit en zone rurale (407 559). L’analyse dynamique met en évidence l’accroissement rapide de la population durant la dernière période intercensitaire.

Par ailleurs, les rapports de masculinité par tranche d’âge montrent d’une manière générale un déséquilibre entre les sexes. En effet, le rapport global de masculinité s’élève à 98% soit 98 hommes pour 100 femmes. L’avantage numérique des hommes s’observe jusqu’à 33 ans. Toutefois à partir de cet âge les femmes prédominent. Cet état de fait pourrait être expliqué par l’effet conjugué de la mortalité et de la migration (surtout l’exode vers les autres centres urbains du pays) et à l’étranger qui touche plus les hommes que les femmes. Cette situation n’est pas sans effet, car elle influe sur le dynamisme économique de la ville.

L’économie régionale est pour l’essentiel une économie à vocation agricole. D’après le RGPHAE, plus de 4/5 des ménages pratiquent l’agriculture. Les spéculations dominantes restent le riz pluvial, l’arachide et le mil. L’exploitation forestière et l’arboriculture, notamment, fruitière constitue un secteur d’espoir pour les populations. Dans ce sillage, la région de Sédhiou est deuxième en termes de production d’anacarde avec 33%. Idem pour la filière banane et mangue.

L’élevage en majorité de type extensif sédentaire, constitue une activité essentielle de l’économie régionale. Les espèces élevées dans la région sont essentiellement composées des bovins, composés essentiellement de la race N’dama et de quelques métis issus de races locales (département de Bounkiling) et de races exotiques (produits des campagnes d’insémination artificielle). Arrosé par le fleuve Casamance et ses affluents, Sédhiou est une région où se développent d’importantes activités piscicoles. Les principales espèces rencontrées sont les carpes, les mulets et les crustacés. Il faut cependant noter la raréfaction de plus en plus accrue de la ressource halieutique.

Dans ce travail, la méthode boule de neige a été appliquée pour la collecte de données socio-économiques. La complexité de la thématique en milieu « mandingue » nous a incité à opter pour cette approche. En effet, en communauté mandingue les hommes ont tendance à dire que la clé du paradis, « arjanna thiabbo » (la clé du paradis en mandingue) est assujettie aux défis que relèvera la femme pour épargner son ménage à la paupérisation. En ce sens, pendant le déroulement des enquêtes, l’équipe s’assure de demander une orientation ou indication pour la cible suivante. Deux types de données ont été collectées, il s’agit des données primaires (revue bibliographique) et des données secondaires (enquêtes de terrains et entretiens).

Les données primaires ont été obtenues via la revue des articles, ouvrages et rapport d’étude sur la question abordée. Ces documents nous ont permis d’asseoir un contexte solide et de proposer un draft de questionnaire soumis aux acteurs afférents à l’étude.

Les données secondaires sont collectées à travers les outils de collecte de données quantitatives (questionnaire) et qualitatives (guide d’entretien). Le questionnaire est adressé à 100 ménages dont 80 femmes et 20 hommes résidants des villages de Bambali Brassou, Simbandi Brassou, Badobar et Tanaf. En partant de l’hypothèse globale selon laquelle, la question de la division du travail touche tous les ménages ruraux de la région Sédhiou, le choix des villages de l’étude s’est fait de façon aléatoire.

Les entretiens individuels effectués ont eu pour cible les leaders coutumiers (4), les responsables de groupements de femmes (4) et les autorités territoriales (2). Les données collectées ont été traitées par le logiciel IBM SPSS statistics 22. La représentation cartographique s’est faite via le logiciel Arcgis 10.2 pour la situation géographique des sites d’étude.

Résultats

Les résultats d’enquête révèlent trois principales activités qui rythment la vie des femmes et des hommes de la moyenne Casamance :

  • Les activités de reproduction comprennent : la préparation des trois repas normaux, la vaisselle et la lessive, la recherche de bois de chauffe et de l’eau, l’entretien et les soins aux enfants et aux personnes âgées, l’éducation des enfants et enfin le nettoyage des cours des maisons et des rues. Dans les soins aux enfants sont compris les soins de santé.
  • Les activités de production pour ce qui concerne la période de l’enquête sont : la riziculture, le maraîchage, le petit commerce, la production de bois de chauffe et de charbon de bois, la transformation des produits agricoles, l’élevage des bovins, ovins et caprins, l’arboriculture, la participation aux foires hebdomadaires, la production des fruits dans les quelques rares vergers.
  • Les activités de représentation sociale comprennent : la participation aux organisations locales, à la vie politique, au bien public (entretien des mosquées, salubrité au niveau du village) et aux affaires religieuses, la gestion de l’hygiène des points d’eau potable, la participation aux évènements sociaux comme les funérailles, les baptêmes et les mariages.

Chez les femmes et chez les hommes, nous avons trois catégories : la catégorie des filles qui ne sont pas encore mariées, celle des jeunes femmes et celle des femmes âgées ou les vieilles pour les femmes ; et la catégorie des garçons, celle des adultes et celle des hommes âgés ou les vieux pour les hommes.

Nous avons choisi de regrouper toutes les catégories en deux, c’est-à-dire (homme et femme). Pour pondérer l’implication de chaque catégorie, nous avons utilisé des croix(xxx). Une croix signifie que la catégorie est faiblement impliquée, deux croix donnent la moyenne à la catégorie en termes de poids et les trois croix signifient que la catégorie est fortement impliquée dans l’activité. L’évaluation temps des activités a été un peu difficile pour les femmes car certaines activités ne se pratiquent pas tous les jours. Alors elles ont donné le nombre d’heures par jour ou par semaine pour certaines activités, et l’intervalle de temps pour d’autres.

Tableau 1 : Organisation des charges de travail en Moyenne Casamance

L’analyse du tableau 1 révèle que pour les activités de reproduction, c’est un ensemble d’activités réservées aux femmes, qui sont exclusivement les actrices de la préparation des repas consommés dans les familles. Elles le sont également pour : la lessive, la vaisselle, la recherche de bois de chauffe et l’eau et pour les questions de salubrité des concessions et des rues. Elles s’occupent également de tous les soins apportés aux enfants et aux personnes âgées pour leur santé et leur survie. L’éducation sociale des enfants leur incombe également en partie, même si c’est la seule activité de reproduction à laquelle les hommes participent en milieu mandingue. Par ailleurs, les petites ou jeunes filles jouent un rôle important dans la mesure où elles aident leurs belles-sœurs ou leurs mamans dans les tâches ménagères. Elles apportent donc leur aide dans la recherche du bois de chauffe, la lessive ou la vaisselle. Dans les villages de Bambali et ses environs, la plupart des activités de salubrité sont faites par les jeunes filles.

Pour ce qui concerne les activités de production, le tableau 1 présente la situation au moment où la collecte des données a été effectuée (décembre-janvier). En Casamance ou au Sénégal généralement, cette période correspond à la saison sèche où les activités agricoles sont terminées. Elles font place aux activités de contre saison, dont le maraîchage. C’est une activité quasi féminine dans plusieurs villages en Casamance. Cette activité est plus pratiquée par les femmes âgées qui passent toutes leurs journées sur les parcelles maraîchères.

En saison pluvieuse, les activités agricoles prennent la place du maraîchage dans le tableau et concernent la production de céréales (riz, mil/sorgho, maïs et arachide) sur de grandes superficies au niveau des plateaux pour les hommes et sur des petites parcelles rizicoles pour les femmes. Elles y produisent essentiellement du riz. Les jeunes femmes participent aux travaux agricoles (semis, désherbage, récoltes) dans les champs de leurs maris et aident leurs belles-mères également dans les rizières. En cette période, le maraîchage est au ralenti et engage seulement quelques peu de femmes au alentours des maisons. Pour les jeunes femmes, à ces activités, s’ajoute le petit commerce qui continue pour la satisfaction de divers besoins quotidiens. Les animaux sont nourris en ce moment par la nature. L’élevage des bovins est du ressort des hommes adultes et vieux puisque c’est une activité qui demande trop de fond et elle est également considérée comme un investissement. Il concerne faiblement les femmes âgées qui sont généralement aidées par leurs fils pour posséder une ou deux têtes qu’elles gardent à la maison ou dans le troupeau de leurs maris ou dans celui de leurs fils. Les ovins/caprins sont gardés dans le village très souvent attachés sous des hangars ou en liberté. Ils appartiennent aux hommes adultes et vieux ainsi qu’aux femmes âgées et l’implication des garçons, des filles et des jeunes femmes se limite à l’alimentation de ces animaux. Toutefois, il existe des jeunes garçons proches du mariage ou des jeunes femmes qui possèdent quelques têtes dans le troupeau familial. Les jeunes femmes sont les plus actives dans le petit commerce des produits de première nécessité comme le sucre et le savon, car ces activités ne nécessitent pas de posséder une portion de terre pour leurs réalisations, mais plutôt un petit fond pour les achats de petits stocks qu’elles gardent dans un coin de leur maison. Ce fond, elles arrivent à l’avoir avec les tontines qu’elles font au sein des groupements de quartiers ou villageois. Ces tontines sont très répandues dans les villages. Il s’agit de groupements de personnes versant périodiquement une même somme et percevant, tour à tour, la globalité des versements individuels.

La production arboricoles (de fruits) est très développée en moyenne Casamance à cause des bonnes conditions climatiques, et elle concerne les hommes à qui appartiennent les vergers. Les filles et les garçons s’occupent de la récolte, et les jeunes femmes et les femmes âgées sont les actrices de la commercialisation des productions. Cependant, certains hommes vendent eux-mêmes leurs productions. La production du bois de chauffe et du charbon de bois est du ressort des jeunes femmes surtout et des maris qui sont restés dans les villages pendant la saison sèche. Cette activité reste une des plus destructrices des ressources naturelles cependant, elle est bien pratiquée dans de nombreux villages de la moyenne Casamance. La transformation des produits agricoles est pratiquée par les femmes âgées et jeunes, et concerne les fruits et légumes. Elle vise à réduire les pertes en stockage cependant, cette activité reste encore timide en Casamance à cause de la faiblesse des rendements et de la faible maîtrise des techniques par les femmes. Les foires hebdomadaires constituent des lieux d’échanges très intéressants pour les hommes et pour les femmes. Elles sont les lieux où ils/elles font leurs échanges ou vendent les produits issus de leurs activités de production agricole et d’exploitation des ressources forestières. Les hommes adultes, les vieux et les femmes âgées y passent leur journée tandis que les jeunes femmes n’y vont qu’après avoir fini leurs activités domestiques. Ces foires constituent de véritables lieux d’échange d’informations sur les prix des produits, mais aussi sur les techniques de production des cultures et d’élevage des animaux.

La représentation en collectivité est la catégorie d’activités qui connaît le plus d’implication de la part de tous les hommes et toutes les femmes, et ce, toutes catégories confondues. La participation aux organisations et la vie politique sont dominées par les hommes adultes, les vieux et les femmes âgées avec une moyenne implication des jeunes femmes. Cette implication est plus marquée dans les tontines qui sont à la base. Dans la vie politique, la participation des jeunes femmes et des jeunes garçons (les adolescents) est plutôt importante lors des campagnes électorales où les politiciens ont besoin des voix pour gagner les élections. Dans la gestion du bien public (salubrité des points d’eau, des mosquées et des centres de santé), les jeunes femmes, les filles et les jeunes garçons sont les plus actifs/actives à cause de la force physique nécessaire pour ce travail. En Casamance, les puits traditionnels sont les moyens les plus utilisés pour la fourniture des familles en eau potable.

Selon les données collectées, la problématique de la gestion du travail en Moyenne Casamance est dû à divers facteurs dont, pour certains, des réponses sont en train d’être apportées par les acteurs.

1. Les facteurs de la réorganisation des tâches dans les activités socio-économiques

1.1. De l’identité culturelle mandingue (historique)

En effet, au Sénégal, il ait une coutume de nommer “femme au foyer” , ménagère, toutes braves dames sans occupation professionnelle formelle. Dans l’occupation formelle nous entendons, un emploi régi par un contrat ou un engagement par les tiers. Une société caractérisée par un faible niveau d’instruction dans la plupart de ces régions avec une proportion de scolarisation des femmes en deçà des seuils indiqués, ne s’indigne guère d’une population féminine inactive si tant est qu’elle soit inactive ; il me semble que non. Ces tendances se justifient par des facteurs à la fois socio-culturels, économiques et même politiques que nous nous dispensons de lister dans cet article. Nous procédons plutôt à un bref survol, de l’occupation quotidienne des femmes aux foyers de la communauté mandingue. Le terme « mandingue » est une déformation du mot mandenka, c’est-à-dire « habitant du Manden » (ka étant le suffixe signifiant « habitant »), le foyer historique de l’empire du Mali. Le terme Malinké d’origine peul est synonyme de Mandingue. Les Mandingues ont fondé de nombreux autres royaumes qui ont perduré jusqu’à la fin du XIXe siècle et le début de la colonisation européenne, dont les plus connus sont :  le Bambouk, entre le Mali et le Sénégal le Niani, Woulli, dans le Sénégal oriental, le Kaabu, entre le Sénégal et la Guinée-Bissau (Tamsir Niane, 1989). Cette dernière zone géographique correspond au Sud du Sénégal, constituée des régions de Ziguinchor et de Sédhiou.

Les activités domestiques ont toujours été sous la responsabilité de la femme. Parmi les tâches qui en font partie, on peut mentionner l’approvisionnement en eau, le nettoyage des espaces de l’unité domestique et de ses alentours, la lessive, la vaisselle, les soins (pour l’ensemble des membres de la famille et particulièrement pour ceux qui sont dans un état de dépendance, à savoir les bébés, les enfants en bas âge, les personnes malades ou à mobilité réduite et les personnes âgées) et enfin la préparation et le service des repas.

En effet, au village (mais également à la maison), il est peu probable de voir un homme de la famille puiser l’eau pour la consommation familiale, intervenir dans les tâches de la cuisine ou de la lessive ni prodiguer des soins à d’autres membres de l’unité domestique”
(recueil du récit d’un leader coutumier du village de Simbandi Brassou).

Ces activités sont considérées comme l’essence de l’identité féminine. Pour ces derniers, la femme ou la jeune fille est dans une dynamique d’apprentissage avant de rejoindre son foyer (Larrue, 2002).  

1.2. La religion, élément de la pesanteur dans l’organisation du travail

A l’appel du muezzin, les hommes sont sur pied pour vaquer à leurs obligations religieuses dans la concession ou à la mosquée. Finalisant l’acte de dévotion avec l’espoir que chaque jour est une expression de bonheur et que demain sera meilleur, les moros s’installent sous l’arbre à palabre en toute quiétude, guettant tranquillement le petit déjeuner ; une calebasse de “monii” soigneusement préparée par la maîtresse de la maison, s’il y en a une. Autrement, dans le cas d’un ménage polygame, celle disposant le tour assure la cuisine. Autant s’affiche une longue journée de discussion sous l’arbre à palabre, autant elle promet longueur et rigueur chez la femme. Retracer les activités quotidiennes des femmes “socce”, permet une lecture à trois niveaux notamment, en tant que maîtresse de maison, puis membre d’une communauté et en tant qu’épouse. La troisième variable, plus importante que les autres ne sera pas analysée car suscitant moins d’engouement pour certaines en ce qu’elle ne résume qu’à satisfaire le besoin charnel de l’époux même après une rude journée champêtre.

1.3. Les mutations environnementales sur une éventuelle redéfinition de la division sexuelle des tâches ?

L’environnement biophysique de la Casamance subit les conséquences de la variabilité hydroclimatique et de la modification du cours du fleuve Casamance (Sané et al., 2018). Depuis les années 1970, ces fluctuations périodiques portent atteinte aux activités agricoles tributaires des eaux de pluies (Cabral, 2012). Ces événements ont non seulement amoindri les surfaces cultivables mais ont d’autre part engendré une forte réduction de la main-d’œuvre agricole (Alexandre et Mering, 2018 ; Diedhiou et Mering, 2019). Un groupe de population rurale a rejoint les villes secondaires, d’autres Dakar et les autres pays de la sous-région. Face à cet afflux de personnes vers les villes, le monde rural s’est presque vidé de son potentiel humain (Robin, 2006). Les activités agricoles allaient au ralenti du fait d’une main d’œuvre rare. Nonobstant, les paysans de la Moyenne Casamance s’organisent le mieux possible en vue de maintenir leur secteur prioritaire en marche avec des stratégies rudimentaires ou encore traditionnelles.

Une agriculture vivrière autarcique de subsistance, à l’abri des marchés, mais en dépendance totale des fluctuations climatiques, reste dans bien des cas la seule survie rurale (Diedhiou et Mering, 2019). Les terres de bas-fonds étant affectées et la monoculture arachidière affectée par les échanges internationaux, les solutions se tournent vers l’agriculture de contre saison. Dans les terroirs villageois visités, les embryons de périmètres maraîchers sont répertoriés, exploités en grande partie par les femmes.

Toutefois, les activités génératrices de revenus s’exercent dans un rayon très proche du village. Conformément aux activités énoncées plus haut, elles sont actives dans l’agriculture à la fois vivrière (mil, riz, bissap, tomate, oignon, etc) et de rente (arachide, agrumes et anacarde) ; elles adhèrent à des coopératives paysannes et ou associations villageoises pour bénéficier de portion de parcelles cultivables.

2. Reconversion des exploitants agricoles en milieu mandingue

2.1. Profils des exploitants agricoles

Les conditions climatiques peu favorables ont contribué à la baisse des  productions agricoles en Moyenne Casamance. Le phénomène de salinisation gagne de plus en plus d’espace, obligeant les femmes d’occuper de plus en plus les plateaux. Dans un monde/environnement idéal, cela serait source de conflit d’usage. Mais, il semblerait que tout se passe bien. Les effets de la variabilités climatique (salinisation des terres, manques d’eau, baisses des productions…) ont démotivé nombre de paysans à se maintenir dans les activités agricoles. Il s’agit notamment des hommes qui occupent les plateaux suivant la division sexuelle travail. La reconversion vers d’autres activités comme l’arboriculture ou le commerce est une option alternative à l’agriculture classique en dérive depuis ces trente dernières années. Les quelques rares jeunes qui n’ont pas choisi le chemin de l’immigration dans les grands centres urbains s’activent dans le transport (Jakarta).

“L’activité du transport à moto Jakarta est plus rentable que toute activité agricole. On peut cultiver la terre toute une saison pour n’avoir qu’une récolte dérisoire. L’agriculture ne permet pas d’assurer nos besoins. En revanche, grâce au transport, les jeunes de ce village arrivent à s’en sortir et deviennent de plus en plus autonomes
(témoignage d’un jeune conducteur de Jakarta du village de Bambali Brassou, commune de Dioudoubou).

2.2. Quel avenir pour l’agriculture en Moyenne Casamance ?

Ces dernières années, de nouveaux défis se posent pour satisfaire les besoins alimentaires des structures socio-économiques en mutation. Les changements globaux ne promeuvent pas une agriculture extensive. Par contre, une réorganisation des tâches agricoles en milieu rural s’impose pour mieux aider les agriculteurs à mieux structurer leurs terroirs et faire de l’agriculture un levier de développement. Une société paysanne, caractérisée par une division du travail limitée, ne peut guère débouchée sur une grande différenciation d’un territoire, si ce n’est des différences induites par les potentialités liées à la géographie naturelle (sols, climats, topographie) (Scott et Lériche, 2018).

a) Le problème de l’accès au foncier

Le foncier est identifié comme facteur limitant du fait de l’insécurité foncière avec des terres de cultures/d’exploitation considérées comme un patrimoine familial qui peut être cultivé (mais non acquis) et à léguer par le chef de famille. Les jeunes, particulièrement les jeunes femmes n’y ont donc quasiment pas accès pour des raisons sociales/traditionnelles de sécurisation foncière. Pourtant la zone possède un capital foncier immense du fait de la disponibilité de terres arables généralement très fertiles avec des conditions agro-climatiques favorables rendant possible l’entrepreneuriat agricole la première voie entrepreneuriale de la Casamance. D’ailleurs, il semble que les jeunes (femmes) qui veulent entreprendre et ont besoin de foncier y accèdent surtout avec l’appui d’un projet et la promesse d’un financement. Parmi les répondants, 18% des JE et femmes mariées enquêtés confirment avoir pu sécuriser une parcelle de moins d’un hectare pour des activités maraîchères. Souvent l’obtention du droit d’exploiter la terre repose sur la mise en place d’un groupement ou coopérative agricole en milieu rural. Pour les hommes, les associations sont une sorte de garantie d’autant qu’elles regroupent plusieurs catégories de femmes.

Toutefois, des changements se dessinent avec un contexte presque complexe de la productivité ou rentabilité de l’agriculture en Casamance. De par les conséquences de la migration saisonnière et celle d’opportunité, seules les femmes demeurent les plus actives aux travaux agricoles. Sachant que le foncier en Casamance intéresse de plus en plus l’agro-business avec des zones où la pression foncière s’est considérablement accrue (Sédhiou, département de Ziguinchor avec la mise en place en vue de l’Agropole Sud, toutes les zones urbaines et périurbaines comme à Tanaf, etc.). Dans le Sédhiou par exemple, la spéculation foncière s’intensifie rendant cette zone jadis réservoir arable de plus en plus sous pression. Dans cette zone, s’ajoute l’arrivée de projets agricoles comme le PRODAC à travers la mise en place du DAC de SEFA (commune de Koussy), l’entrepreneuriat agricole peut prendre de nouvelles élans mettant au-devant les gentes féminines.

b) L’accès au crédit et équipements agricole

L’accès au crédit et financements agricoles n’est pas tout à fait facile en Casamance. Plusieurs défis s’expliquent le plus souvent. On peut en déduire l’absence du leadership féminin, la non implication des femmes dans les instances de décisions et le monopole de l’information par les hommes en milieu rural. Les femmes ont d’énormes difficultés à mettre en place des organisations communautaires structurées, fonctionnelles et dynamiques en faveur du développement des activités génératrices de revenus. Des éléments de réponse sont reçues quoiqu’elles ne sont pas informées voir impliquées. En illustration des propos d’une femme active dans le maraichage :

“Je me suis lancée dans l’agriculture depuis l’âge de 16 ans. Aujourd’hui, j’exploite deux parcelles rizicole de moins de 100m2 et une petite ferme à la maison qui ne me rapportent pas plus de 50.000 Fcfa par campagne. Je m’investis à fond dans cette activité. Par contre, cela ne rapporte pas beaucoup et les femmes n’ont pas un mouvement associatif solide

Le récit de cette femme originaire du village de Badobar (commune de Simbandin Brassou) renseigne à tel point les femmes peinent à bénéficier d’appui émanent des organismes privés et étatiques. Comme indiqué dans le tableau ci-dessous, la représentation des femmes semble faible sur plusieurs secteurs d’activités. Elles ne sont pas trop impliquées dans la vie politique (13%) contre une forte participation des hommes (73%). Leur implication dans les groupements locaux est aussi faible (12%) pour un score de 88% pour les hommes. Le constat est qu’elles s’impliquent plus aux gestion de l’hygiène des points d’eau de consommation (74%); aux baptêmes/mariages (69%) et moins (46%) aux funérailles.

Tableau 2 : Représentation associative en valeur relative (%)

Discussion

À la lumière des résultats présentés, il apparaît nécessaire de replacer les constats empiriques dans une perspective plus large, tenant compte des dimensions sociales, politiques et environnementales qui structurent la division du travail selon le genre en Moyenne Casamance. Cette discussion vise ainsi à analyser les implications de ces résultats pour la compréhension des dynamiques rurales, dans un contexte marqué par la variabilité climatique et les transformations socio-économiques.

1. Implications sociales : entre traditions et dynamiques d’adaptation

Les données de terrain confirment que la division sexuelle du travail demeure profondément enracinée dans les structures sociales et culturelles mandingues. Historiquement assignées aux activités domestiques et de reproduction sociale, les femmes continuent d’occuper une place centrale dans la survie économique des ménages sans pour autant bénéficier d’une reconnaissance équitable.

Cependant, une tendance d’adaptation se dessine : la féminisation progressive des activités productives, notamment agricoles et commerciales. L’exode des jeunes hommes, la scolarisation et la raréfaction de la main-d’œuvre ont conduit les femmes à s’investir davantage dans les champs, le maraîchage et le petit commerce. Cette réorganisation silencieuse traduit une mutation du travail féminin, non pas par rupture avec la tradition, mais par nécessité face à la précarité et aux défis climatiques.

Ainsi, les femmes rurales deviennent de véritables actrices de la résilience communautaire, même si leur contribution reste sous-évaluée socialement et économiquement. Leur implication accrue dans la production agricole et la gestion domestique renforce la stabilité des ménages mais accentue leur charge de travail, accentuant les inégalités structurelles.

2. Implications politiques : limites des politiques d’équité et de parité

Sur le plan institutionnel, les politiques nationales d’équité de genre, notamment la loi sur la parité et la Stratégie nationale pour l’équité et l’égalité de genre (SNEEG 2016-2026), ont permis d’amorcer un cadre d’action pour l’inclusion des femmes. Toutefois, leur impact réel dans les zones rurales reste limité.

En Moyenne Casamance, la faible participation féminine aux structures locales de gouvernance et aux organisations communautaires témoigne d’un décalage entre les textes et les pratiques. Les normes sociales, la hiérarchie patriarcale et la faible alphabétisation freinent l’appropriation de ces politiques par les populations rurales.

Le foncier illustre parfaitement cette contradiction : bien que les terres arables soient abondantes, leur contrôle reste masculin. Les femmes n’accèdent à la terre qu’à travers des projets, des groupements ou la médiation de leurs conjoints. Sans réforme foncière inclusive et sans renforcement du leadership féminin, les politiques d’égalité risquent de rester symboliques.

Cette réalité plaide pour une approche territorialisée de la gouvernance du genre, articulant les institutions formelles (État, collectivités locales, ONG) et les structures traditionnelles afin d’ancrer l’équité dans les pratiques locales.

3. Implications environnementales : vulnérabilité différenciée et résilience féminine

Les mutations environnementales en Casamance accentuent les disparités entre hommes et femmes dans l’accès et le contrôle des ressources naturelles. Les phénomènes de salinisation des terres, de baisse de la pluviométrie et de raréfaction des ressources forestières fragilisent particulièrement les activités féminines, concentrées sur les bas-fonds rizicoles et les périmètres maraîchers.

Pourtant, les femmes développent des stratégies d’adaptation diversifiées : intensification du maraîchage de contre-saison, recours aux cultures à cycle court, adhésion à des coopératives agricoles, ou encore recyclage des déchets organiques pour fertiliser les sols. Ces innovations locales, bien que peu visibles dans les statistiques officielles, traduisent une écologie de subsistance qui repose sur la créativité et la solidarité féminine.

Cependant, ces efforts demeurent isolés en raison du manque d’accompagnement technique, de formation et de financement. Une politique environnementale sensible au genre devrait reconnaître ces pratiques endogènes comme des leviers essentiels de résilience climatique et de durabilité rurale.

4. Vers une redéfinition territoriale du travail et de la gouvernance rurale

L’analyse des résultats révèle que la transformation de la Moyenne Casamance passe nécessairement par une relecture des rapports de genre dans le développement rural. Le travail féminin, longtemps perçu comme complémentaire, est aujourd’hui au cœur du maintien des systèmes de production et de la cohésion sociale.

Pourtant, sans sécurisation foncière, sans accès équitable aux crédits et équipements agricoles, et sans représentation politique effective, les potentialités féminines resteront sous-exploitées. La gouvernance territoriale doit donc évoluer vers un modèle plus inclusif, intégrant les femmes comme cogestionnaires des ressources naturelles et du développement local.

Une telle évolution pourrait repositionner la Moyenne Casamance comme un espace pilote en matière d’innovation sociale et écologique, où les savoirs féminins, les pratiques locales et les politiques publiques se conjuguent pour construire un développement rural durable et équitable.

En somme, la division du travail selon le genre en Moyenne Casamance ne peut être appréhendée indépendamment des logiques culturelles, des politiques de gouvernance et des mutations environnementales. Les femmes, bien qu’au cœur du système productif et de la résilience communautaire, continuent d’évoluer dans un cadre de contraintes sociales et institutionnelles. La reconnaissance et la valorisation de leur rôle apparaissent comme des conditions incontournables pour toute stratégie de développement durable et d’adaptation au changement climatique dans la région.

Conclusion

La question de la distribution des tâches se dessinent toujours en Moyenne Casamance. A travers cette étude, les données collectées indiquent plusieurs facteurs et faits à l’origine de la division sexuelle du travail.

L’analyse des activités menées en milieu rural casamançais révèle une logique genrée de la division sexuelle du travail. Cette logique s’articule sur des croyances religieuses et traditionnelles.  Ces croyances régissent et rythment la vie et les activités socio-économiques des populations de la moyenne Casamance. Les femmes, principales productrices agricoles, se voient marginalisées dans les instances politiques (Coquery-Vidrovitch, 2011).. Elles sont aussi victimes d’un remarquable inégal accès aux ressources (foncière, financière, équipement).

En dépit de cette marginalisation, elles assurent en grande partie la sécurité alimentaire des ménages ruraux. Dans les domaines liés à l’alimentation, on note que les tâches non rémunérées et peu valorisées sont majoritairement attribuées aux femmes. Ce sont généralement des tâches qui soutiennent l’ensemble de la reproduction sociale et rendent possible l’extraction de la plus-value, mais qui ne donnent accès ni à l’autonomie économique ni à une position sociale permettant l’autodétermination. La division sexuelle du travail, ainsi que d’autres dimensions des inégalités entre les sexes, comme le manque d’accès des femmes à la terre et aux moyens de production, se situent au fondement de tout le système alimentaire et économique de la moyenne Casamance.

De plus, l’accentuation des perturbations climatiques (sécheresse, déforestation, salinisation des terres agricoles, etc.) a entraîné une très forte régression de la production vivrière. Les conditions de vie des populations rurales se sont beaucoup détériorées, rendant ainsi les femmes plus vulnérables et augmentant leur temps de travail.

Toutefois, des pistes de solutions se profilent via l’arrivée de nouvelles organisations et plateformes non internationales en faveur de l’émancipation des femmes du monde rural.

César Gomis
Docteur en géographie, chercheur associé au Laboratoire de recherches RURALITES, Université de Poitiers

Pour citer cette publication : César Gomis, Division du travail selon le genre dans un contexte de changement climatique en Moyenne Casamance (Sud du Sénégal), AgriGenre, novembre 2025  
Source en ligne : https://agrigenre.hypotheses.org/26944
DOI : https://doi.org/10.58079/152r5

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